Âgé de 86 ans, Abdullah Ibrahim (aussi connu sous le nom de Dollar Brand) est l’un des plus célèbres musiciens d’Afrique du Sud. Née sous le régime de l’Apartheid, où la musique jazz était considérée comme un acte de résistance, sa musique est souvent perçue comme un symbole de liberté. De fait, son morceau anti apartheid “Mannenberg” (publié sous le nom de “Capetown Fringe” aux États-Unis) est devenu un hymne national officieux d’Afrique du Sud, et il a même joué à l’inauguration de Nelson Mandela où ce dernier l’a désigné comme “notre Mozart”. De Duke Ellington à Max Roach en passant par John Coltrane et Ornette Coleman, la liste de ses collaborations est impressionnante. Il est également le père de la rappeuse Jean Grae. Abdullah Ibrahim s’est vu décerner l’Ordre du Soleil Levant par le gouvernement japonais, l’une des plus hautes distinctions du pays. Il a aussi fait partie des lauréats étrangers des Spring Imperial Awards de 2020 remis par sa majesté, l’empereur du Japon. Ce prix lui a été remis en reconnaissance d’une vie dédiée à l’émancipation du peuple sud africain, et de sa contribution à l’amitié nippo-sud-africaine à travers son œuvre, ses performances et sa compréhension profonde de la spiritualité et de la culture japonaises.
Solotude est une œuvre à la fois méditative, mélancolique et inspirante. Même en solo, Abdullah Ibrahim est capable de cocher de nombreuses cases stylistiques du jazz moderne en revisitant ici quelques classiques de son répertoire et des morceaux d’albums plus récents, et en dévoilant de nouvelles compositions telles que “In-Tempo”, “Once Upon A Midnight”, ou “Signal On A Hill”. “Blue Bolero”, l’une des pièces de Solotude, illustre parfaitement le ton de l’enregistrement qui fluctue à merveille entre mélodies évocatrices et thèmes nostalgiques profondément personnels. Malgré sa courte durée, ce morceau est une invitation à la contemplation et met en lumière la nature hautement intimiste de Solotude et le jeu si particulier d’Ibrahim. Évoquant son premier contact avec la musique et son illustre carrière, Abdullah Ibrahim a écrit : “À 6 ans, je touchais ma première note de piano du bout de l’index. 80 ans et 10 doigts plus tard – et un long voyage qui m’a conduit de Cape Town aux quatre coins du monde et amené à côtoyer les plus illustres mentors -, l’index s’est dévoilé pour ne jouer plus qu’une seule note, celle de l’unité universelle.”